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lundi 26 mars 2012

Le FME et le FAME, deux instances concurrentes aux objectifs affichés communs


FAME et FME
jeudi 15 mars

A quelques stations de métro de la manifestation « officielle » du Forum mondial de l’eau (FME), se tient le Forum alternatif mondial de l’eau (FAME) dans les Docks des Sud, ancien entrepôt portuaire reconverti en espace de manifestations culturelles. Dans une ambiance militante, plus festive et conviviale que le forum officiel, mais tout aussi professionnelle et internationale, les sessions sur le droit à l’eau et les inégalités d’accès à l’eau et à l’assainissement, les services publics et la tarification de l’eau se succèdent.

Nathalia, une étudiante brésilienne à Sciences-Po Paris, travaillant sur le FAME pour la Confédération paysanne et militante de la Marche mondiale des femmes, explique comment se place le FAME par rapport au FME : « Ceux du forum alternatif ne reconnaissent pas le forum officiel car il n’est pas un espace légitime de discussion. Les solutions qui sont prônées là-bas sont surtout bénéfiques aux entreprises privées, pas aux populations. C’est pour cette raison qu’on le nomme le forum marchand. Ici, on entend beaucoup de témoignages faisant part de l’exclusion des populations, notamment par les entreprises privées, par la privatisation. Ici, les gens partagent leurs alternatives et leur combat, ils veulent sortir du système capitaliste et donc des solutions qui en sont issues car, dans ce système, seuls ceux qui produisent sont intéressants et peuvent être entendus. Ils remettent en cause cette logique qui produit de l’exclusion. »

Le FME fait partie de la génération des réunions internationales hors cadres institutionnels : des instances onusiennes sont présentes, ainsi que de nombreux gouvernements et des autorités territoriales, des entreprises, et quelques trop rares organisations non gouvernementales. Il est ouvert mais les prix d’entrée sont prohibitifs pour le grand public (700 euros le pass de 6 jours pour les ressortissants des pays OCDE et développés selon le classement onusien, et 350 euros pour les participants d’autres pays). Seuls les étudiants bénéficient d’un tarif d’accès préférentiel (30 euros pour les 6 jours). Le FAME a été créé pour faire contrepoids au forum officiel, dans la même logique que les autres contre-fora qui « accompagnent » souvent les grandes rencontres officielles. L’entrée y est gratuite.

Bien que des discussions entre les deux fora existent, avec plus ou moins de succès (cf. billet ci-dessous), que certaines personnalités comme Catarina de Albuquerque, rapporteuse spéciale des Nations-Unies pour le droit à l’eau et à l’assainissement ou des acteurs comme Coalition eau, groupe d’ONG, soient présents aux deux manifestations, que les constats et les objectifs puissent se rejoindre, que la volonté des participants soit que l’eau devienne une priorité dans les agendas politiques, la séparation est franche quant aux moyens préconisés. Il est regrettable que le dialogue ne soit pas plus ouvert et fructueux.

A titre d’exemple de sessions du FAME, nous avons suivi la session « Eau et femmes : l’eau, un frein à l'émancipation ? ». Celle-ci était composée de deux séries d’interventions devant un public de femmes en grande partie, comme dans la plupart des discussions où le genre est mis en avant. D’abord, quatre présentations faites par des associations de femmes africaines démontraient les conséquences négatives de la corvée d’eau en termes de développement et d’inégalité hommes-femmes. Elles attendaient du forum alternatif qu’il incite les dirigeants politiques à se préoccuper de cette question. L’intervention suivante portait sur la conséquence de la politique israélienne de colonisation sur l’accès à l’eau des Palestiniens, engendrant une injustice inadmissible. La solution préconisée ici est politique pour empêcher des pratiques de discrimination des populations palestiniennes, qui ne peuvent que provoquer plus de haine. Le dernier exemple faisait état de la manière dont des femmes brésiliennes du Nordeste, fortement unies, avaient réussi à impulser un changement à la fois en termes d’accès à l’eau et d’amélioration de l’égalité homme-femme dans les prises de décisions, du foyer à la communauté. La méthode d’action était originale : dans un processus de formation se répandant de groupe de femmes à groupe de femmes, les femmes apprenaient elles-mêmes à construire des citernes en béton permettant de stocker l’eau sans qu’elle s’évapore. La force de cette initiative montrait que l’accès à l’eau ne peut dans certains cas s’acquérir qu’au terme d’un combat que chaque communauté doit s’approprier.

Eudora, Master 2 Affaires internationales, Sciences Po Paris
Maguelone, Master 2 Affaires internationales, Sciences Po Paris

2 commentaires:

  1. Bonjour Maguelone,
    Merci pour ce témoignage sur l'axe thématique "Femmes et Eau" dont j'avais la responsabilité.
    Le titre exact de l'atelier était "l'eau : un frein à l'émancipation ? (sous entendue émancipation des femmes : temps pour l'éducation, temps pour des activités génératrice de revenus, temps pour vivre, etc....) d'où le dernier témoignage du Brésil prenait toute sa valeur.
    Cordialement
    Isabelle Marilier

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  2. Merci pour votre remarque Isabelle !
    L'intitulé de l'atelier est maintenant corrigé.

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